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Lettres

des textes variés : poésie, nouvelles etc ...

Chaleurs d'hiver

Par une chaleur de trente-huit degrés, nous arrivâmes au village où demeurait Augustine. La randonnée s'achevait et nous étions fourbus. Pensez donc, vingt kilomètres de marche et un sacré dénivelé. Le crépuscule jetait son obscurité sur le flanc de l'immense montagne qui fermait la vallée de Pradines, dernier village avant la frontière italienne. Augustine nous accueillit avec sa félicité habituelle.

" Heureusement qu'il ne faisait pas chaud aujourd'hui. Je vous ai préparé de quoi reprendre des forces les gars.

- Oui, heureusement que les températures sont redevenues clémentes. Le temps redevient raisonnable en comparaison des chaleurs ardentes du plein été, quand ça monte en flèche jusqu'à soixante, soixante dix. On aurait jamais essayé de grimper dans ces conditions de toute façon.

- Je sais bien que vous restez raisonnable les gars, que vous avez la tête sur les épaules pour ne pas aller vous aventurer en plein mois de juin dans ce genre d'aventure."

Ils se ruèrent vers la douche. Leur hôte retourna vers la cuisine pour leur préparer un  rafraichissement. Quand ils ressortirent à l'air libre, après un rapide essorage, ils se mirent à grelotter.

" Mettez donc ces gros pulls chauds avant d'attraper la crève. J'ai ressorti aussi des pantalons de velours. La saison n'est plus à se balader en maillot de bain, à babiller dans l'eau de la rivière; l'hiver approche, on l'a vu aujourd'hui: il n'est pas impossible que nous descendions en dessous des trente degrés avant la fin de la semaine.

- Durant la nuit ? Je crois que tu exagères un peu Augustine, que tu dramatises la saison. On n'a jamais vu de telles baisses de température en novembre, à moins que tu ne parles d'une époque révolue, celle de nos lointains ancêtres. 

Augustine s'agita sans répondre au fond de sa belle cuisine repeinte. Cette époque là ne lui disait rien. Depuis sa naissance, elle n'avait jamais connu un temps glacial, ne savait pas qu'existât ce qu'on appelait la neige, cette matière blanche et froide donnée par l'eau de pluie les jours d'hiver. ( elle en avait vérifiée la teneur sur internet, vue qu'elle était incapable de se l'imaginer). La saison fraiche commençait pour elle maintenant, avec ces petits trente degrés qui pointaient. Elle qui n'osait plus sortir de sa jolie maison désormais protégée par l'armature "à la norme 2052", comme cette fameuse année où avait débuté la prise de conscience planétaire de l'explosion du réchauffement du climat. C'était il y déjà bien longtemps, de brûlants siècles s'étaient depuis écoulés mais le génie humain avait réussi à corriger le tir en développant des techniques de protections efficaces pour affronter la période de chaleur intense, entre avril et septembre.  

" Venez me retrouver ici les gars, que je vous serve à boire. Si quelqu'un veut aussi grignoter, vous me le dites.

- Tu as une vue magnifique Augustine, je comprends que tu passes autant de temps dans cette pièce.

- Ce que tu vois au loin, dans l'éclat rougeoyant du soleil, c'est le pic Ambel, l'un des hauts sommets du massif. J'ai lu qu'autrefois c'était un spot de ski réputé qui attirait les foules.

- Au temps de la neige ?

- Exactement, dans cette époque lointaine où vécurent nos ancêtres. Quand j'y pense, je me dis parfois, qu'ils avaient bien de la chance de ne pas subir comme nous une chaleur perpétuelle.    

- Je ne sais pas. Le froid tuait aussi les gens dehors"

Augustine brancha le correcteur automatique de température.      

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